Livestock Research for Rural Development 27 (10) 2015 | Guide for preparation of papers | LRRD Newsletter | Citation of this paper |
Cent quarante naissains d’Archachatina marginata d’un poids vif moyen de 5,43 ± 1,90 g avec une longueur moyenne de coquille de 2,95 ± 0,35 mm et âgés d’un mois, ont été élevés pendant 7 mois. Ces animaux ont été soumis à différentes fréquences de manipulation : 2 jours (L 2j), une semaine (L1s), deux semaines (L2s) et un mois (L1m). Un lot témoin (L0) n’ayant pas subi de manipulations a été également pris en compte. Tous les animaux ont été nourris avec de la farine de céréale.
Cette étude a révélé que la fréquence de manipulation influence négativement les paramètres de croissance d’Archachatina marginata. Les effets nocifs de la manipulation sont minimisés à partir d’une fréquence de manipulation de deux semaines pour une alimentation habituelle. Cette fréquence pourrait être conseillée à tout expérimentateur travaillant sur les escargots géants d’Afrique. Par ailleurs, l’éleveur se doit de limiter les manipulations pour un meilleur rendement de la croissance.
Mots-clés: Côte d’Ivoire, longueur
One hundred and forty spat of Archachatina marginata (Swainson 1821) of mean live weight of 5.43 ± 1.90 g with an average shell length of 2.95 ± 0.35 mm and one month old, were bred for 7 months. These animals were subjected to handling at different frequencies: 2 days (L2j), one week (L1s), two weeks (L2s) and one month (L1m). A control group (L0) without handling was also taken into account. All animals were fed with cereal flour.
This study showed that the frequency of manipulation adversely affects growth parameters of Archachatina marginata. The harmful effects are reduced at when manipulation frequency is at a two-week interval. This frequency may be recommended for researchers working on giant African snails. However, the breeder must limit handling for better growth performance.
Keywords: Côte d’Ivoire, length, weight
Les ressources forestières font, depuis longtemps, partie intégrante des stratégies de sécurité alimentaire de nombreux pays sub-sahéliens (Stievenart et Hardouin 1990). Elles fournissent aux ménages une part très importante des protéines d’origine animale, voire la quasi totalité de ces protéines dans certaines zones très isolées (Ategbo et Zongo 2000). Cependant, la destruction de la forêt, le défrichement anarchique, la création des plantations industrielles et les feux de brousses ont occasionné la disparition du biotope de plusieurs espèces animales dont les escargots géants d’Afrique. Or l’approvisionnement des consommateurs en ces animaux se fait essentiellement à partir des produits de récolte dans la nature. Ainsi, leur domestication apparaît comme une alternative nouvelle pour palier ce déficit. Dès le début des années 1970, il a été démontré qu’il était possible d’élever les escargots géants (Ajayi 1971). Ces animaux constituent une source de nutriments pour l’alimentation humaine et / ou animale (Aboua et Boka 1996, Otchoumou et al 2003). Leur élevage contribue à la préservation de la biodiversité et constitue une source de revenu et de lutte contre la pauvreté (Kouassi 2008). Mais la réussite et le développement d’un tel élevage passe par la maîtrise de de la reproduction et de la croissance de ces animaux.
Dans le présent article, nous nous proposons d’étudier l’effet de la fréquence des pesées et des mensurations coquillières sur la croissance d’ Archachatina marginata (Swainson 1821) en élevage. A terme, cette étude permettra d’apprécier le seuil de la fréquence des manipulations des escargots pour les expérimentateurs ; lequel seuil garantit leur meilleure croissance.
La présente étude s’est déroulée à la ferme achatinicole de l’Université Nangui Abrogoua ex-Université d’Abobo-Adjamé / Côte d’Ivoire de septembre 2009 à mars 2010. Elle a donc duré près de 7 mois. La température et l’humidité moyennes de la salle d’élevage étaient respectivement de 28°C ± 1,8 et 86% ± 2,9.
Cent quarante naissains d’Archachatina marginata d’un mois d’âge, de poids vif moyen de 5,43 ± 1,9 g avec une longueur moyenne de coquille de 2,95 ± 0,35 cm ont été utilisés dans cette étude. Ils ont été repartis en 5 lots (L0, L2j, L1s, L2s et L 1m) homogènes de 28 escargots. Chaque lot était constitué de 4 réplicats de 7 escargots élevés à la densité de 132 escargots / m2 (figure 1). Les différents lots d’escargots ont été manipulés à différentes fréquences. La manipulation a consisté au nettoyage, à la pesée et à la mensuration des longueurs de coquille des animaux. Ainsi, les manipulations ont été faites tous les deux jours pour le lot L2j, chaque semaine pour le lot L1s, toutes les deux semaines pour le lot L2s puis chaque mois pour le lot L1m. Le lot L 0 constituants le témoin n’a pas été manipulé. Il ne l’a été seulement qu’en début et en fin expérience. Tous les animaux ont été nourris avec le même aliment à base de farine de maïs additionnée de 10% de farine de coquille d’huître. Un arrosage quotidien des bacs d’élevage a permis de maintenir constante l’humidité relative. Les refus alimentaires ainsi que les déchets d’animaux ont été retirés tous les deux jours.
Foto 1: Bac d’élevage |
Les croissances pondérale et coquillière ont été estimées selon les expressions :
Croissance pondérale (Cp) :
Cp = (Pf-Pi)/(T2-T1)
Pi : Poids initial
Pf : Poids final
T1 : Temps initial
T2 : Temps final
Croissance coquillière :
Cc= (Lf-Li)/(T2-T1)
Li : Longueur initiale
Lf : Longueur finale
Ne : Nombre total d’escargot
Poids vif moyen (Pvm) :
ΣPv : somme des poids vifs
Longueur moyenne de coquille (Lmc) :
ΣLc : somme des longueurs de coquille
Croissance pondérale moyenne journalière (Cpmj) :
Nj : Nombre de
jour
Croissance coquillière moyenne journalière (Ccmj) :
L’homogénéité des différents lots de départ a été vérifiée selon le test de Bartlett. Le logiciel Statisticat 7.1 a permis d’apprécier les effets factoriels par l’analyse des variances et des valeurs moyennes comparées des fréquences de manipulation. Le test LSD a été appliqué pour faire ressortir les différences entre les valeurs moyennes lorsqu’aucune différence n’a été détectée par l’analyse des variances.
Le tableau I présente les paramètres de croissance pondérale des escargots suivant les fréquences de manipulation. Les poids vifs des animaux à la fin des manipulations se situent entre 59,2 g et 72,6 g pour un gain en poids vif compris entre 53,6 g et 67,3 g. La valeur minimale de poids vif a été obtenue sur le lot L2j où les animaux ont été manipulés tous les 2 jours. En revanche, le lot témoin (L0) où les animaux n’ont pas subi de manipulations, donne la valeur maximale en gain de poids vif. Ces valeurs extrêmes encadrent celles de L1s (chaque semaine), L 2s (toutes les 2 semaines) et L1m (chaque mois) dont les poids vifs à la fin des manipulations sont respectivement de 61,4 g, 62,7 g et 61,6 g. Les résultats de cette expérience montrent une différence significative entre le poids vif moyen des escargots manipulés tous les 2 jours et celui des escargots témoins qui ne sont pas manipulés selon le test HSD de Turkey au seuil de 5%. La différence entre les poids vifs moyens des escargots manipulés chaque semaine, toutes les 2 semaines et chaque mois n’est pas significative. La manipulation influence donc négativement la croissance pondérale des escargots à une fréquence de 2 jours.
Les paramètres de croissance coquillière des escargots suivant les
fréquences de manipulation sont résumés dans le tableau 2. A la fin des
manipulations, les longueurs moyennes de coquille des spécimens varient
entre 7,37 cm et 7,8 cm pour un gain de longueur coquillière situé entre
4,39 cm et 4,88 cm. Les meilleurs croissances coquillières sont obtenues
dans l’ordre L0 (0,271 mm /j), L1m (0,255 mm/j),
L
2s (0,253 mm/j), L1s (0,252 mm/j) et L2j
(0,244 mm/j).
Tableau 1 : Paramètres de croissance pondérale de A. marginata suivant les fréquences de manipulation |
|||||||
Paramètres |
Fréquences de manipulation |
||||||
L2j |
L1s |
L2s |
L1m |
L0 |
ESM |
p |
|
Poids moyen initial (g) |
5,63a |
5,58a |
5,44a |
5,12a |
5,36a |
0,001 |
0,68 |
Poids moyen final (g) |
59,22b |
66,98ab |
68,17ab |
66,75ab |
72,64a |
0,043 |
0,0294 |
Gain en poids vif (g) |
53,59b |
61,4ab |
62,73ab |
61,63ab |
67,28a |
0,049 |
0,0172 |
Croissance pondérale moyenne journalière (g/jour) |
0,298b |
0,341ab |
0,349ab |
0,342ab |
0,374a |
0,03 |
0,0204 |
Les lignes indexées de la même lettre ne sont pas statistiquement différentes (p < 0,05)
|
Tableau 2 : Paramètres de croissance coquillière de A. marginata suivant les fréquences de manipulation |
|||||||
Paramètres |
Fréquences de manipulation |
||||||
L2j |
L1s |
L2s |
L1m |
L0 |
ESM |
p |
|
Longueur moyenne initiale (cm) |
2,98a |
2,99a |
2 ,95a |
2,9a |
2,92a |
0,051 |
0,89 |
Longueur moyenne finale (cm) |
7,37 b |
7,53ab |
7,51ab |
7,49ab |
7,8a |
1,34 |
0,0401 |
Gain en longueur de coquille (cm) |
4,39 b |
4,54ab |
4,56ab |
4,59ab |
4,88a |
1,7 |
0,035 |
Croissance coquillière moyenne journalière (cm/jour) |
0,244b |
0,252ab |
0,253ab |
0,255ab |
0,271a |
0,008 |
0,0381 |
Les lignes indexées de la même lettre ne sont pas statistiquement différentes (p < 0,05)
|
L’analyse des variances au test HSD de TURKEY indique qu’il n’y a aucune différence statistique entre d’une part le lot témoin (absence de manipulations) et les lots L1m, L2s et L1s et d’autre part entre le lot L2j et les lots L1m, L2s et L 1s. Par contre, la différence entre le lot L2j et le lot L0 est significative. La fréquence de manipulation a donc un effet néfaste sur la croissance coquillière des escargots.
La fréquence de manipulation agit négativement sur la croissance de A. marginata comme en témoignent nos résultats. Plus la fréquence de manipulation est élevée au seuil de 2 jours, plus la croissance pondérale des escargots est retardée. La croissance pondérale est donc inversement proportionnelle à la fréquence de manipulation des animaux. Ce même constat est fait sur la croissance coquillière. La manipulation aurait donc un effet de stress sur la croissance des animaux
En effet, le pied à coulisse en métal peut facilement briser les parties néoformées des lèvres coquillières fragiles des jeunes escargots lors des mensurations de coquille. L’escargot devra alors reconstituer sa lèvre coquillière avant de continuer sa croissance. D’où le ralentissement de la vitesse de croissance journalière des escargots qui devient significatif à la fréquence de manipulation rapprochée de 2 jours par rapport à celle des escargots non manipulés. En 1990, des résultats analogues ont été observés par Stievenart et Hardouin sur la même espèce.
D’autre part, les escargots retirés des bacs lors des mensurations, subissent les effets de coup de vent qui dessèchent leur tégument (Chevallier 1995). Il est évident que les animaux manipulés tous les 2 jours subissent plus fréquemment ces effets que ceux n’étant pas manipulés.
Les escargots manipulés tous les 2 jours présentent aussi une croissance pondérale journalière inférieure à celle des escargots non manipulés. Cela suggère que le ralentissement de la croissance coquillière affecte la croissance pondérale. Kondo (1964) et Hodasi (1979) ne disent pas le contraire quand ils affirment que l’énergie fournie par l’aliment est détournée vers les fonctions de réparation de la coquille au cas où celle-ci est endommagée. Ce n’est qu’après ces réparations que cette énergie servira à la croissance, au gain de poids, à l’entretien et à d’autres fonctions telles que la maturation sexuelle et la reproduction. Ces résultats confirment ceux de Verdus et al (1997) qui ont travaillé sur des plantules de lin. Ils ont montré que les plantules repiquées évoluent moins vite que celles qui ne le sont pas. Ceux-ci expliquent ce retard par de petits traumatismes mécaniques subis par les plantules lors du repiquage.
Nos résultats n’indiquent aucune différence significative entre les paramètres de croissance des escargots manipulés chaque semaine, toutes les 2 semaines et chaque mois et ceux des escargots non manipulés. Ce résultat pourrait se justifier par le fait que les escargots étant nourris à l’aliment concentré, le délai d’une semaine serait suffisant pour consolider les coquilles néoformées. Dans le cas d’une alimentation à base de végétaux ou de fourrage, la croissance étant 2 fois moindre selon les travaux de Kouassi (2008), le délai de la fréquence de manipulation reviendrait théoriquement à 2 semaines.
Aboua F et Boka K 1996 Les escargots géants comestibles d’Afrique : Quelques aspects physiques et préparation en Côte d’Ivoire. Nature et faune (FAO), 12 (4): 2-9, 48 p.
Ajayi S S 1971 Wildlife as a source of protein in Nigeria: some priorities for development. The Nigerian Field, 36 (3): 115-127.
Ategbo J M et Zongo D 2000 Effet de la teneur en eau du substrat d’élevage sur la croissance et la survie de Achatina achatina (Linné). Agronomie Africaine 12 (2): 71-79.
Chevallier H 1995 Les escargots : connaissance et élevage. Editions Rustica, 108p.
Hodasi J K M 1979 Life history studies of Achatina achatina (linné). Journal of Molluscan Studies 45: 328-339.
Kondo Y 1964 Growth rates in Achatina fulica (Bowdich). Nautilus, 78: 6-15.
Kouassi K D 2008 Effet de l’alimentation et du substrat d’élevage sur les performances biologiques de Archachatina ventricosa et quelques aspect de la collecte des escargots géants de Côte d’Ivoire. Thèse unique n° 32, Université d’Abobo-Adjamé, 130 p.
Otchoumou A, Dosso H et Fantodji 2003 Elevage comparatif d’escargots juvéniles Achatina achatina (Linné 1758), Achatina fulica (Bowdich 1820) etArchachatina ventricosa (Gould 1850) : Influence de la densité animale sur la croissance, l’ingestion alimentaire et le taux de mortalité cumulée. Revue Africaine de Santé et Productions Animales, 1(2) :146-151.
Stievenart C et Hardouin J 1990 Manuel d’élevage des escargots géants africains sous les tropiques. Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA), Pays-Bas, ISBN Edition 38 p.
Verdus M C, Thellier M and Ripoll C 1997 Storage of environmental signals in fax: their morphogenetic effect as enabled by a transient depletion of calcium plant. Plant Journal, 12 : 1399-1410.
Received 15 Februay 2015; Accepted 5 September 2015; Published 1 October 2015