Valorisation de quelques variétés d’avoine cultivées en Algérie pour l’alimentation des ruminants

H S Arbouche, Y Arbouche, F Arbouche et R Arbouche

Centre universitaire d’El-Tarf Algérie, BP 138 36000 El Tarf Algérie
arbouchefodil@yahoo.fr

Résumé

 Les variétés d’avoine cultivées en Algérie ont des valeurs nutritives différentes des avoines européennes. La différence réside surtout dans la teneur en protéines, en cellulose brute et en lignine. Ceci induit des valeurs fourragères et des teneurs en protéines digestibles intestinales différentes. Afin de maximiser les productions animales nationales, l’utilisation des variétés d’avoine locales ne peut être assimilée, en valeur nutritive, aux avoines européennes.

Mots clés: composition chimique, valeur nutritive, variétés locales

Evaluation of some varieties of oats grown in Algeria as ruminant feed

Abstract

Oat varieties cultivated in Algeria have different nutritional values to the European oats. The difference lies especially in the content of proteins, crude fibre and lignin. This leads to different fodder values and in content of intestinal digestible proteins.. To maximize the feeding of livestock in Algeria,, the use of the local varieties of oat cannot be compared in nutritional value with the European oats

Key words: chemical composition, local varieties, feed value

Introduction

La croissance démographique accrue, les conditions climatiques difficiles caractérisées par des précipitations qui accusent une grande variabilité mensuelle et surtout annuelle (Djellouli 1990), la qualité médiocre des sols et leur dégradation constante, ont contribué à diminuer fortement l’autosuffisance alimentaire entraînant une surexploitation des ressources génétiques naturelles. Cette situation a conduit à l’importation de produits agricoles (espèces et variétés) à haut potentiel génétique dans leur pays d’origine, qui n’ont pas toujours donné les rendements escomptés mais ont surtout contribué à la négligence voire l’oubli des variétés locales. Le cas de l’avoine est un exemple parmi tant d’autres, et son utilisation dans le cadre de l’alimentation du bétail est très peu soutenue du fait de la prédominance de l’utilisation de l’orge. Estimé à  3,5 millions d’unités gros bétail (UGB) (MA 2002), le cheptel algérien est tributaire de l’importation des céréales. L’importation des semences à haut rendement n’a pas résolu le déficit en graines du fait de la non maîtrise des techniques culturales. La préservation des ressources naturelles des variétés d’avoine, peut être conçue à travers leurs intégrations dans les formules alimentaires de nos ruminants après caractérisation de leurs valeurs nutritives. Elles contribueraient même partiellement  à diminuer la part des importations des produits alimentaires (viandes rouges et lait) en assurant un coût de revient des productions animales plus accessible aux consommateurs. Cette céréale est toutefois peu utilisée par l’industrie de l’alimentation animale, du fait de la faveur croissante dont bénéficient l’orge et le maïs qui sont plus productifs et dont les graines ont une meilleure valeur énergétique. L’avoine est très peu cultivée pour la production de graines, la part de cette espèce est de 3,5 % des surfaces cultivées en céréales en Algérie (MA 2002).

Matériel et méthodes

Origine

Les graines d’avoine étudiées sont les variétés Guelma 4, Bahri et Cannelle 2009-23 (ITGC 1995). Le nombre d’échantillons utilisés est de 10 par région et par variété avec des quantités de 1000 g que nous avons homogénéisées avant de prélever la quantité à analyser (200 g). Ils ont été prélevés au niveau des Coopératives de Céréales et Légumes Secs (CCLS) localisées à travers l’Est du pays au cours de la même année de récolte. Les régions touchées sont celles des wilayas de Skikda, Tébessa, Souk Ahras, Constantine, Guelma et Batna.

Analyse chimique 

La composition chimique a été déterminée selon les méthodes de l’Aoac (1990) avec une répétitivité de 3. Les analyses ont porté sur la matière sèche, la matière azotée totale, la cellulose brute, la matière grasse et la matière minérale dont Ca et P. Les composés pariétaux ont été déterminés par la méthode de Van Soest et Wine (1967). La digestibilité in vitro de la matière organique a été déterminée par la méthode d’Aufrère et Graviou (1996) dont l’équation est : DMO= 0,699DcellMO + 22,6 pour les aliments concentrés. Pour la dégradabilité théorique (DT) de la matière azotée, la méthode d’Aufrère et Cartailler (1988) a été employée avec comme équation DT= 0,91DE1 +15,10. L’énergie brute a été déterminée par calorimétrie adiabatique.

Calculs 

Ils ont pour base les équations proposées par Sauvant et al (2004) pour le calcul des valeurs nutritives pour les ruminants.

Pour les PDI:
PDIA= MAT x [1,11 (1-DT)] x dr
PDIMN= MAT [1-1,11 (1-DT)] x 0,9 x 0,8 x 0,8
PDIME= MOF x 0,145 x 0,8 x 0,8
PDIE= PDIA + PDIMN.

Traitement statistique

Ces analyses ont été effectuées à l'aide du programme Statistica 6.0 ( StatSoft Inc. 2001).

Résultats et discussion

Composition chimique

Le taux moyen de matière sèche de nos échantillons d’avoine (90,4 %) est fonction du mode et des conditions de stockage (Tableau 1).

Il fluctue entre 89,6 % (variété Bahri) et 91,4% (variété Cannelle 2009-23). La teneur en matières minérales est assez variable entre les variétés et le taux moyen (3,5 % de MS) se rapproche des résultats avancés par Jarrige (1988) (3 % de MS) et de Rivière (1978) (3,1 % de MS). La teneur moyenne en phosphore (0,2 %de MS) est faible par rapport aux résultats de Rivière (1978) (0,48 % de MS) et de Jarrige (1988) (0,4 % de MS). Cette différence est due à la fertilisation qui est inadéquate. La teneur en calcium moyenne de nos échantillons est assez importante (0,6 % de MS) au regard des résultats présentés par Sauvant et al (2004) (0,12 % de MS), Jarrige (1988) (0,1 % de MS) et Rivière (1978) (0,11 % de MS). Cette forte différence est à imputer au caractère en général alcalin des sols algériens. La teneur en matière grasse avec une moyenne de 4,3 % de MS, est faible face aux résultats de Jarrige (1988) (6,7 % de MS), de  Rivière (1978) (5,2 % de MS) et de Sauvant et al (2004) (5,4 % de MS). Le taux de cellulose brute est assez fluctuant entre les variétés avec 12,7 % de MS pour la variété Cannelle 2009-23 et 14,8 % de MS pour la variété Guelma 4. La moyenne variétale de nos échantillons (14,0 % de MS) est très légèrement supérieure aux données de Rivière (1978) (13,8 % de MS), de Jarrige (1988) (13,5 % de MS) et de Sauvant et al (2004) (13,8 % de MS). Nos variétés d’avoine sont riches en matières azotées totales avec une moyenne de 13,2 % de MS qui est supérieure aux données de Jarrige (1988) et de Sauvant et al (2004) (11,1 % de MS).

Composés pariétaux

 La valeur moyenne des NDF (34,2 % de MS) (Tableau 2) est légèrement supérieure au résultat avancé par Jarrige (1988) (33,8 % de MS).  

Les valeurs en ADF des variétés Guelma 4 et Bahri sont proches (18,3 et 19,1 % de MS respectivement) par rapport à la variété Cannelle 2009-23 (16,6 % de MS). La teneur moyenne (18 % de MS) est plus élevée que le résultat de Sauvant et al (2004) (16,9 % de MS). Le taux de lignine est  pour la variété Cannelle 2009-23 (2,9 % de MS) et pour la variété Guelma 4 (3,6 % de MS) ; la moyenne des 03 variétés (3,2 % de MS) est supérieure au résultat de Jarrige (1988) (2,7 % de MS) et de Sauvant et al (2004) (2,8 % de MS).

Digestibilité de la MO, dégradabilité théorique des protéines et teneur en énergie brute

La digestibilité de la MO est plus importante pour la variété Cannelle 2009-23 (77,1 %) (Tableau 3).  

 La valeur moyenne de l’ensemble des variétés (75,8 %) est plus élevée que le résultat de Jarrige (1988) (74 %). La dégradabilité théorique de l’azote est maximale pour la variété Bahri (88,8 %). La moyenne variétale (86,8 %) est inférieure à la valeur de Sauvant et al (2004) (91,9 %). La teneur en EB de la variété Cannelle 2009-23 (4536g/kg de MS) est la plus importante, la moyenne variétale (4478g/kg de MS) est inférieure aux valeurs de Jarrige (1988) (4800g/kg de MS) et de Sauvant et al (2004) (4654g/kg de MS); 

Unités fourragères lait (UFL) et viande (UFV)

Elles sont maximales pour la variété Cannelle 2009-23 tant en UFL (1,01/kg de MS) qu’en UFV (0,97/kg de MS) (Tableau 4).  

Les valeurs minimales sont représentées par la variété Guelma 4 (0,94/kg de MS en UFL et 0,89/kg de MS en UFV). Les valeurs moyennes des variétés (0,97/kg de MS en UFL, 0,93/kg de MS en UFV) sont inférieures aux résultats avancés par Jarrige (1988) (1,03 et 0,98/kg de MS en UFL et UFV respectivement).

Protéines digestibles intestinales

 Les valeurs en PDI sont fluctuantes entre les variétés (Tableau 5). Les maximums PDIA  la variété Cannelle 2009-23 (17,05g/kg de MS), pour la valeur PDIN à la variété Bahri (82,40g/kg de MS) et pour la valeur PDIE à la variété Cannelle 2009-23 (82,13g/kg de MS). Les valeurs moyennes en PDIA (15,73g/kg de MS) et PDIE (80,53g/kg de MS) sont inférieures aux valeurs enregistrées par Jarrige (1988) (26 et 84g/kg de MS  respectivement) mais  supérieures en PDIN (80,64g/kg de MS contre 74g/kg de MS). Selon Sauvant et al (2004), les valeurs contenues dans l’avoine en PDIE et PDIN sont inférieures (61g/kg de MS)  et similaire en PDIA (16g/kg de MS).

Conclusion    

• Les grandes différences qui ressortent  entre les variétés d’avoine cultivées en Algérie et les avoines européennes sont : la valeur élevée des taux de matière azotée, de cellulose brute et de lignine pour les  variétés cultivées localement ; des valeurs fourragères UFL et UFV moins importantes et des valeurs en PDI  qui fluctuent en fonction de la variété. D’où la nécessité de ne pas assimiler les valeurs nutritives des avoines européennes à celles qui sont cultivées localement.

Bibliographie

AOAC 1990. Official Methods of Analysis of the Association of Official Analytical Chemistry. 15^th edition Washington, D.C. U.S.A.

Aufrère J et Cartailler D 1988  Mise au point d'une méthode de laboratoire de prévision de la dégradabilité des protéines alimentaires des aliments concentrés dans le rumen. Annale de  Zootechnie 37 (4) 255-270 http://animres.edpsciences.org/index.php?option=article&access=standard&Itemid=129&url=/articles/animres/pdf/1988/04/Ann.Zootech._0003-424X_1988_37_4_ART0003.pdf

Aufrère J et Graviou D 1996. Prévision de la digestibilité des fourrages et aliments concentrés et composés des herbivores par une méthode enzymatique pepsine-cellulase. Note du bureau inter professionnel d’études analytiques 278 p126 France.

Djellouli Y 1990  Flores et climats en Algérie septentrionale. Déterminismes climatiques de la répartition des plantes. Thèse Doctorat es Sciences, Université des sciences et technique houari Boumediene Alger 210 p.

Jarrige R 1988  Alimentation des bovins, ovins et caprins ; Institut National de la Recherche Agronomique Paris  p471

ITGC (institut technique des grandes cultures) 1995  Les principales variétés de céréales cultivées en Algérie. Catalogue. 1-114.

MA 2002 (Ministère de l’agriculture) Situation et perspectives de développement des ressources génétiques utilisées dans l’agriculture  Rapport du groupe de travail spécialisé/RG. Algérie

Rivière R 1978  Manuel d’alimentation des ruminants domestiques en milieu tropical, 2e édition. Paris, France, ministère de la Coopération, 527 p.

Sauvant D, Perez J M et Tran G 2004  Table de composition et de valeur nutritive des matières premières destinées aux animaux d’élevage. INRA. 2ème édition revue et corrigée p301

StatSoft 2001 STATISTICA. Data analysis software system.Versión 6. USA

Van-Soest P J and Wine R N 1967 Use of detergents in the analysis of fibrous feeds. IV-Determination of plant cell-wall constituents. Journal Association off Agricultural  Chemistry  50 : 50-55

Received 11 October 2010; Accepted 12 February 2011; Published 1 April 2011

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