Livestock Research for Rural Development 32 (1) 2020 LRRD Search LRRD Misssion Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

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Performances de reproduction de cochons d’Inde complémentés au Commelina benghalensis et au Moringa oleifera au cours de deux cycles

A M L Faïhun, G C Akouedegni, A G Zoffoun, J A Dossou, I Tossa Gbego et S M Hounzangbé-Adoté

Laboratoire d’ethnopharmacologie et de santé animale, Faculté des Sciences Agronomiques, Université d’Abomey-Calavi, 01 BP 526 Cotonou, Bénin
faihun@yahoo.fr

Resumé

La complémentation permet d’optimiser la productivité des cochons d’Inde de boucherie. L’objectif de cet essai est de comparer les performances de reproduction des cochons d’Inde recevant des rations contenant Commelina benghalensis ou Moringa oleifera au cours de deux cycles de reproduction. A cet effet, 30 femelles nullipares de 354±82 g et 15 mâles de 424±26 g âgés de 4 mois ont été répartis en cinq traitements avec pour chacun trois lots de 2 femelles et un mâle (soit 2 fois 6 femelles et 3 mâles par traitement). Les cinq traitements correspondaient aux rations expérimentales telles que la ration T à base uniquement de son blé, la ration M20 (son de blé + Moringa oleifera à 20% d’incorporation), les rations C10, C20 et C30 (son de blé + Commelina benghalensis respectivement aux taux d’incorporation de 10%, 20% et 30%). Des familles de reproduction (1 mâle + 2 femelles) ont été constituées pour 31 jours et suivies pendant deux cycles de reproduction. Le taux de fertilité a été de 100% dans tous les lots sauf dans le lot C30. La taille moyenne de portée la plus élevée obtenue a été de 2,02 dans le lot C30 au premier cycle. Le taux de mortinatalité a été élevé chez les cochonnets du lot M20 (26,5%). Les cochonnets des lots C10 et C20 ont eu des GMQ élevés (environ 4 g/j) que ce soit au premier ou au second cycle. Commelina benghalensis pourrait être recommandé dans l’alimentation des cochons d’Inde en reproduction aux taux d’incorporation de 10% et 20% ; l’utilisation de Moringa oleifera dans l’alimentation de ces derniers devrait se faire à un taux d’incorporation plus réduit que 20%.

Mots-clés: Bénin, Cavia porcellus, complémentation, paramètres de reproduction


Reproductive performances of guinea pigs (Cavia porcellus) supplemented with Commelina benghalensis and Moringa oleifera during two cycles

Abstract

Supplementation optimizes the productivity of butcher’s guinea pigs. The purpose of this study is to compare the reproductive performances of guinea pigs receiving diets containing Commelina benghalensis or Moringa oleifera during two reproductive cycles. Thirty nulliparous females (weight 354±82 g) and fifteen males (weight 424±26 g), four months aged were used. They were divided into five treatments and three repetitions of 2 females and a male (2 times 6 females and 3 males). The five treatments corresponded to five experimental diets such as diet T based on wheat bran, diet M20 (wheat bran + Moringa oleifera at 20% of incorporation) diets C10, C20 and C30 (wheat bran + Commelina benghalensis respectively at graded incorporation levels 10%, 20% and 30%). Breeding families (1 male and two females) were formed for 31 days and followed for two reproductives cycles. The fertility rate was 100% in all batches except batch C30. The highest average litter size was 2.2 recorded in batch C30 during the first cycle. The mortality was higher in piglets for batch M20 (26,5%). The piglets of batches C10 and C20 had high daily weight gains (around 4g/d). Commelina benghalensis could be recommanded in the feeding of guinea pigs during reproduction; the use of Moringa oleifera in their diet should be made at a low incorporation rate (< 20%).

Keywords: Benin, Cavia porcellus, reproductive parameter, supplementation


Introduction

Au Bénin, la pauvreté apparaît beaucoup plus comme un phénomène rural dans un contexte économique principalement caractérisé par la prépondérance du secteur agricole. Le secteur productif agricole caractérisé par la prédominance des exploitations agricoles de type familial présente une productivité faible. Pour couvrir les besoins alimentaires des populations, le Bénin continue d’importer massivement entre autres des produits congelés (volailles et produits halieutiques), des œufs de table et du lait, situation qui entraîne des pertes importantes en devises (MAEP 2017). La mise sur pied des élevages à cycles courts s’avère l’une des solutions durables pour répondre aux problèmes d’insécurité alimentaire (UN 2005). Les cochons d’Inde sont prolifiques et faciles à élever ; leur élevage apparait comme une solution rapide pouvant être utilisée pour compenser les déficiences en protéines dans les zones rurales (Handlos 2018). Cependant, dans les pays africains au sud du Sahara, la productivité de ces animaux à l’intérieur des exploitations traditionnelles demeure faible comparativement à ceux de l’Amérique latine (Ayagirwe et al 2018). Les éleveurs localisés majoritairement en milieu rural avec un faible pouvoir d’achat n’ont pas la notion de supplémentation qui permet de pallier les déficits en principes nutritifs, d’intensifier la production en vue de profiter de la prolificité, de la précocité et de la rusticité de ces animaux (Kouakou et al 2010 ; Bindelle et Picron 2013). La solution la plus raisonnable et pouvant être adoptée par un grand nombre d’éleveurs de cochons d’Inde à faible revenu est l’emploi d’ingrédients protéiques non conventionnels tels que des espèces fourragères à bonne valeur nutritive (Dahouda et al 2013 ; Miegoue et al 2016). Plusieurs espèces fourragères appartenant aux familles des fabacées, des astéracées et des euphorbiacées ont déjà fait objet d’investigations scientifiques. Ces espèces fourragères ont induit de bonnes performances de croissance et de reproduction (Kenfack et al 2006 ; Mweugang et al 2016 ; Faïhun et al 2019a et b). D’autres espèces fourragères locales de bonne valeur nutritive et également utilisées dans la médecine traditionnelle peuvent aussi faire objet d’étude dans l’alimentation des cochons d’Inde. Ainsi l’objectif de cet essai est de comparer les performances de reproduction des femelles recevant des rations contenant Commelina benghalensis ou Moringa oleifera au cours de deux cycles de reproduction.

Matériels et méthodes

L’essai s’est déroulé entre octobre 2017 et mai 2018 sur la ferme d’application de la Faculté des Sciences Agronomiques (FSA) de l’Université d’Abomey-Calavi (UAC), localisée au Sud de la République du Bénin. Le climat dans le Sud de la République du Bénin est de type guinéen caractérisé par deux saisons sèches et deux saisons pluvieuses avec une pluviométrie moyenne annuelle de 1200 mm et des températures moyennes mensuelles variant de 27°C à 31°C.

Pour cet essai, 45 cochons d’Inde adultes de race locale dont 30 femelles nullipares de 354±82 g et 15 mâles de 424±26 g âgés d’environ 4 mois ont été répartis en cinq traitements avec trois répétitions. Tous les animaux utilisés étaient issus du cheptel de la Ferme d’Application. Les traitements correspondant aux rations expérimentales sont la ration T à base uniquement de son de blé, la ration M20 composée de son de blé mélangé à la poudre des feuilles sèches du moringa oleifère (Moringa oleifera, Moringaceae) à 20% d’incorporation, les rations C10, C20 et C30 à base de son de blé et la poudre des parties aériennes séchées de comméline du Bengale (Commelina benghalensis, Commelinaceae) respectivement aux taux d’incorporation de 10%, 20% et 30%. Ces rations étaient présentées aux animaux sous forme de granulés de diamètre 4 cm. La ration M20 a été retenue sur la base des travaux de Tedonkeng Pamo et al (2005) qui ont obtenu de meilleurs résultats avec ce type de ration sur les cochons d’Inde.

L’unité expérimentale était composée de 2 femelles et un mâle constituant les familles de reproduction. Chaque unité expérimentale était logée dans une cage faite en bois à fond grillagé de 1 m x 1 m x 0,6 m disposé dans un bâtiment en béton. Ce système (un mâle et deux femelles) est le plus productif. Les familles de reproduction de 1 mâle et 2 femelles ont été constituées pour 31 jours ; passé ce délai les mâles ont été séparés des femelles. L’identification des animaux a été faite par coloration de leur pelage.

Chaque lot de cochons d’Inde composé de trois unités expérimentales a reçu une ration expérimentale. Les animaux des différents lots (T, M20, C10, C20 et C30) étaient soumis aux traitements suivants:

Chacune des rations expérimentales était distribuée aux animaux une fois par jour à 15 h. S’agissant des quantités d’aliments servies, elles ont été maintenues chez les gestantes et les allaitantes jusqu’au sevrage des petits (21 jours après leur naissance). Les animaux ont été suivis pendant deux cycles de reproduction. Avant le démarrage de l’essai, tous les cochons d’Inde affectés à un traitement ont reçu la ration expérimentale correspondante pendant une période de 1 semaine. Cette précaution a été prise afin de permettre à ces derniers de s’habituer au nouveau régime alimentaire.

Le poids des femelles était pris chaque semaine du début de l’essai à la mise-bas et ensuite jusqu’au sevrage des petits (3 semaines après leur naissance). Ceci a permis d’évaluer l’évolution pondérale pré et post-partum. Le nombre de femelles gestantes, ayant mis bas et le nombre de cochonnets nés ont été enregistrés au cours de chaque cycle de reproduction. Chaque cochonnet était identifié et pesé à la naissance. Les pesées ont ensuite été faites toutes les semaines jusqu’à la 3ème semaine (sevrage). Les poids enregistrés ont permis d’évaluer la croissance pré-sevrage des cochonnets.

Un échantillon de 100 g de chaque ressource fourragère (préalablement séché à température ambiante) et de chaque ration expérimentale a été prélevé pour l’analyse bromatologique selon la méthode AOAC (1990).

Les paramètres suivants ont été calculés : taux de fertilité apparente, taux de fécondité, taux de prolificité, taux de mortinatalité, taux de mortalité avant sevrage.

Les données sur l’évolution pondérale pendant la gestation et l’allaitement et sur les paramètres de reproduction ont été soumises à une analyse de la variance (ANOVA) à deux facteurs (rations et cycles de reproduction) suivant le Modèle Linéaire Général (MLG). Lorsque les différences entre les moyennes étaient significatives, le test de Tukey au seuil de 5% permettait la séparation. Le logiciel R.2.15.3 a été utilisé pour réaliser les différents tests.

Résultats

Les parties aériennes de Commelina benghalensis contiennent la plus faible teneur en protéines brutes (13,4%). Les énergies brutes et métabolisables de ces dernières ont été également les plus faibles respectivement de 3676 kcal/kg-MS et 1660 kcal/kg-MS. La ration T à base de son de blé a présenté la plus forte teneur en fibre (42,8%), son énergie brute a été la plus élevée (4339 kcal/kg-MS). La ration M20 a montré la plus forte teneur en protéines brutes (19,2%) et le niveau d’énergie métabolisable le plus élevé (1946 kcal/kg-MS). Les rations expérimentales contenant Commelina benghalensis ont présenté une valeur de teneur en protéines brutes tournant autour de 17%. Toutefois la ration C30 a montré une valeur plus élevée de l’énergie métabolisable (1884 kcal/kg-MS) (Tableau 1).

Tableau 1. Composition chimique des différents aliments expérimentaux
Aliments
Expérimentaux
Composition chimique (%MS) EB
(kcal/kg-MS)
EM
(kcal/kg-MS)
HR MG PB MM FT
Panicum maximum local 12,3 2,7 19,7 10,3 32,9 4110 1813
Moringa oleifera 13,3 9,8 28,1 13,6 11,7 4202 1896
Commelina benghalensis 13,4 2,4 13,4 19,5 13,5 3676 1660
Ration T 8,8 6, 3 18,8 5,9 42,8 4339 1898
Ration M20 10,5 2,1 19,2 6,3 10,3 4289 1946
Ration C10 10,2 2,3 17,6 11,4 11,5 4053 1835
Ration C20 11,3 1,4 17,5 10,7 11,2 4087 1852
Ration C30 11,1 2,4 17,1 9,1 10,6 4154 1884
HR= humidité résiduelle; MG= matières grasses; PB= protéines brutes; MM= cendres; FT= fibresb totales ;
EB= énergie brute; EM= énergie métabolisable

L’intervalle entre la mise au mâle et la parturition a été plus long chez les femelles du lot M20 (79 jours) ; le plus court intervalle a été observé chez les reproductrices du lot C10 (76 jours) et cela a été comparable (p˃0,05) avec ceux enregistrés pour les autres lots. Les paramètres tels que la taille moyenne de portée et le taux de prolificité n’ont pas aussi varié différemment suivant la ration (p˃0,05) cependant les valeurs les plus élevées pour ces deux paramètres ont été enregistrées dans les lots C20 (2,00 et 200%) et C30 (2,02 et 202%). Le taux de fertilité a été de 100% dans tous les lots sauf dans le lot C30 où il était de 91,7%. La nature de la ration a influencé (p˂0,05) les types de naissances, de mortinatalité et de mortalité avant sevrage des cochonnets. Ainsi il a été enregistré un pourcentage plus élevé de portée unique dans le lot T (41,7%) et plus de portées gémellaires dans les lots de femelles complémentées au Commelina benghalensis (58,3% pour C10, 83,3% pour C20 et 66,7% pour C30). Les taux de mortinatalité et mortalité avant sevrage des cochonnets ont été également plus enregistrés dans les lots T (20,2% et 4,6%) et M20 (26,5% et 11,1%). Aucune mortalité avant sevrage n’a été enregistrée chez les cochonnets des lots C10, C20 et C30 (Tableau 2).

Tableau 2. Paramètres de reproduction chez les cochons d’Inde au cours des deux cycles (n = 6 femelles par lot et par cycle)
Paramètres LOTS ESM p
T M20 C10 C20 C30
Durée M-P(jour) 77,4 79,3 76,0 78,7 78,3 5,3 0,85
Portée par femelle 1,84 1,84 1,84 2,00 2,02 0,63 0,71
Pourc. NS (%) 41,7a 33,3b 33,3b 8,3d 16,7c 21,1 0,02
Pourc. ND (%) 41,7d 50,0c 58,3c 83,3a 66,7b 17,9 0,01
Pourc. NT (%) 16,7a 16,7a 8,3b 8,3b 8,3b 13,7 0,03
Taux Fert (%) 100,0 100,0 100,0 100,0 91,7 5,27 0,94
Taux Feco (%) 158 133 150 175 167 27,44 0,32
Taux Prol (%) 183 183 186 200 202 27,82 0,56
Taux MN (%) 20,2 b 26,5 a 18,3b 11,5c 8,7d 9,2 0,01
Taux MAS (%) 4,6b 11,1a 0,0c 0,0c 0,0 7,3 ˂0,001
Nombre CN au 1er cycle 7 7 8 10 10
Nombre CN au 2ème cycle 12 9 10 11 10
Nombre total CN 19 16 18 21 20
Durée M-P(j)= Intervalle entre la mise au mâle et la parturition ; Taux Fert= taux de fertilité apparente ; Taux Feco= taux de fécondité ; Taux prol= taux de prolificité ; Taux MN= taux de mortinatalité ; Taux MAS= taux de mortalité des cochonnets au cours de la période de lactation ; Taux MAS= taux de mortalité au cours de la période de lactation ; Pourc. NS%= pourcentage de naissance simple ; Pourc. ND%=pourcentage de naissance double ; Pourc. NT%=pourcentage de naissance triple ; C N = cochonnets nés vivants et ayant atteint le sevrage ; a, b : Les moyennes portant les mêmes lettres sur la même ligne ne sont pas significativement différentes au seuil de 5%

En comparant les performances des reproductrices d’un cycle à un autre, les moyennes obtenues pour les taux de fécondité et de prolificité ont été comparables dans tous les lots ; les valeurs les plus élevées pour ces deux paramètres étant enregistrées dans la majorité des cas au second cycle de reproduction. Le taux de fertilité n’a pas varié significativement d’un cycle à un autre (p˃0,05) dans tous les lots. Le taux de mortinatalité des cochonnets n’a pas également varié significativement d’un cycle à un autre (p˃0,05) dans tous les lots sauf dans le lot T où les deux valeurs obtenues n’étaient pas similaires (p˂0,05) (Figure 1).

Figure 1. Comparaison des performances de reproduction des femelles en fonction du cycle
a,b Les moyennes portant les mêmes lettres pour une même ration ne sont pas significativement différentes d’un cycle de reproduction à un autre au seuil de 5% ;
TFERT : taux de fertilité ; TFECO : taux de fécondité ; TPROL : taux de prolificité ;TMN : taux de mortinatalité ; TMAS : taux de mortalité avant sevrage

Au cours du premier cycle de reproduction, les gains de poids pendant le premier et le second mois de gestation n’ont pas été similaires (P˂0,05). Les gains de poids le plus élevé et le plus faible ont été obtenus respectivement au cours du premier mois chez les femelles du lot C10 (206 g soit une augmentation de 54%) et les femelles du lot C30 (182 g soit une augmentation de 50%). Au second mois de gestation, les reproductrices du lot M20 ont montré le gain total de poids le plus élevé (297 g soit une augmentation de 79%) ; les reproductrices du lot C30 ont toujours montré une augmentation plus faible de poids (253 g soit une augmentation de 69,7%) (Figure 2).

Au second cycle de reproduction, les reproductrices des lots T et M20 ont montré les gains de poids les plus élevés au cours du premier et second mois de gestation, les gains de poids pour les deux périodes considérées sont de 142 g et 223 g pour le lot T correspondant respectivement à une augmentation de 29% et 46%. Les valeurs obtenues pour le lot M20 sont de 145 g et de 235 g correspondant respectivement à une augmentation de 28% et 46%. Au cours de ce cycle de reproduction, les femelles du lot C30 ont présenté le gain de poids le plus faible au cours des deux périodes (128 g au cours du premier mois soit une augmentation de 27,7% et 192 g au cours du second mois soit une augmentation 41,5%). Il faut signaler que les valeurs de gain de poids que ce soit au premier ou second mois et ceci au cours des deux cycles de reproduction n’ont pas été comparables (p˂0,05) (Figure 2).

Figure 2. Evolution pondérale des femelles au cours de la gestation en fonction du cycle de reproduction

Pendant la période de lactation au premier cycle, la perte de poids la plus faible (-0,29 g/j) des reproductrices a été observée chez les reproductrices du lot T et la perte de poids la plus élevée chez les reproductrices du lot M20 (-2,17 g/j). Ainsi au sevrage des cochonnets les reproductrices du lot T ont perdu 1,42 % de leur poids et celles du lot M20 ont perdu 9,31% de leur poids Au second cycle de reproduction, les reproductrices des lots T et C30 ont montré les pertes de poids les plus faibles au cours de la période de lactation (-3,66 g/j) soient respectivement des pertes de 14,3% et 14,4% de leur poids vif. Ces différentes pertes de poids enregistrées chez les femelles des différents lots n’ont pas été comparables d’un cycle à un autre (p˂0,05) (Figure 3).

Figure 3. Evolution pondérale des femelles au cours de la période de lactation en fonction du cycle de reproduction

Les poids des cochonnets à la naissance ont varié de 73 g à 80 g et ils ont été influencés par le type de ration (p˂.0,05). Les cochonnets les plus lourds sont du lot C10 et les plus légers du lot C30. Au sevrage les poids des cochonnets ont varié de 141 g à162 g et ont été également influencés par le type de ration (p˂0,05). Les cochonnets les plus lourds et les plus légers à la fin de la période de lactation ont été respectivement ceux des lots C10 et C30. Les gains moyens quotidiens enregistrés ont varié de 3,1 g/j à 4,0 g/j, les cochonnets des lots C10 et C20 ayant montré une croissance pondérale plus rapide (Tableau 3).

Tableau 3. Croissance présevrage des cochonnets en fonction des rations
Paramètres Rations ESM p
T M20 C10 C20 C30
Pds naissance (g) 74,91b 78,36ab 80,93a 75,54b 73,47b 5,72 0,02
Pds au sevrage (g) 146,8b 157,69ab 162,71a 161,33a 141,21b 11,61 0,015
Gains totaux (g) 73,19c 79,33b 77,37b 84,79a 65,10d 10,98 0,01
GMQ (g/j) 3,47c 3,62b 3,78b 4,04a 3,11d 0,45 0,03
a,b: Les moyennes portant les mêmes lettres sur la même ligne ne sont pas significativement différentes au seuil de 5%, Pds naissance: poids de naissance; Pds au sevrage: poids au sevrage; GMQ: gain moyen quotidien

Les poids de naissance des cochonnets dans tous les lots d’un cycle à un autre n’ont pas été comparables (p˂0,05). Les cochonnets des lots T, C20 et C30 ont montré des poids de naissance plus lourds au second cycle alors que ceux des lots M20 et C10 ont été plus lourds au second cycle. Les gains de poids ont été également plus élevés au cours du premier cycle de reproduction et n’ont pas été comparables à ceux du premier cycle (p˂0,05) (Figure 4).

Figure 4. Comparaison de la croissance pré-sevrage de cochonnets en fonction des cycles
a,b: Les moyennes portant les mêmes lettres pour une même ration ne sont pas significativement
différentes d’un cycle de reproduction à un autre au seuil de 5%

Discussion

Les différentes rations utilisées au cours de cette étude ont présenté des valeurs d’énergie métabolisable comprise entre 1800 kcal et 1950 kcal. Ces valeurs sont comprises entre l’intervalle 1700-2800 kca/kgMS recommandé par Clarke et al (1977) pour une croissance normale des cochons d’Inde.

Le taux de fertilité a été de 100% dans tous les lots sauf dans le lot C30 où il est passé de 83,3% à 100% de la première à la deuxième mise bas. Les deux plantes (Commelina benghalensis et Moringa oleifera) utilisées dans la formulation des rations n’ont donc pas eu un impact négatif sur la fertilité des femelles. Un taux de fertilité de 100% a été également enregistré par Kouakou et al (2012) chez des cochons d’Inde supplémentés aux granulés pour lapin en Côte d’Ivoire. Un faible taux de fertilité (50%) a été rapporté par Azine et al (2016) chez des reproductrices supplémentées au Galinsoga sp. et Bidens pilosa au Cameroun. Selon ces auteurs, la faible valeur du taux de fertilité enregistré chez ses reproductrices serait liée à la présence de substances anti nutritionnelles (saponine) et/ou d’extraits inhibiteurs de la synthèse des hormones sexuelles, empêchant l’implantation de l’œuf et provoquant des avortements. La taille moyenne de portée et du taux de prolificité les plus élevés obtenus à l’issue de cet essai ont été respectivement de 2,20 et 220% enregistrés chez les reproductrices du lot C30 au premier cycle de reproduction. Ces valeurs sont supérieures à celles rapportées par Azine et al (2016) (1,16 et 117%). La taille moyenne de portée la plus élevée rapportée en Côte d’Ivoire par Kouakou et al (2012) a été faible par rapport à la nôtre. Mweugang et al (2016) au Cameroun ont par contre rapporté une valeur de taille moyenne de portée (2,07) comparable à la nôtre pour des cochons d’Inde supplémentés à la poudre de feuilles de manioc. Ces variations dans les valeurs seraient liées à la nature des différentes rations utilisées dans les différents tests. Chez les cochons d’Inde en effet, le nombre de petits par portée est un trait de caractère génétique qui dépend des conditions d’élevage (Fransolet et al 1994). Une alimentation équilibrée réduit la pression de reproduction sur les femelles et par conséquent permet d’améliorer la production (Kouakou et al 2015).

La taille de portée chez l’espèce semblerait aussi être impactée par son environnement. Au Gabon par exemple, Fransolet et al (1994) ont rapporté une taille de portée élevée de 3 petits chez les cochons d’Inde locaux. Dans les systèmes de production traditionnels de cochons d’Inde au Pérou, la taille de portée varie de 1,7 à 3,0. Au premier cycle de reproduction les rations contenant Commelina benghalensis ont induit la naissance de triplets et plus de jumeaux ; au second cycle par contre, mis à part qu’aucune portée de triplets n’ait été enregistrée, un fort pourcentage de naissance gémellaire a été par contre recensé. De façon cumulative pour les deux cycles, le nombre de cochonnets vivants après le sevrage à 21 jours a été plus élevé chez les reproductrices des lots C10, C20 et C30. Ces observations permettent de reconnaitre à Commelina benghalensis un certain effet positif sur la prolificité des reproductrices. Ceci abonde dans le même sens que Burkill (2000), Telefo (2011) qui rapportent que cette plante augmente la fertilité. Du premier au second cycle de reproduction, le temps écoulé entre la mise au mâle et la parturition chez les reproductrices supplémentées au Commelina benghalensis est passé du plus long au plus court tandis que chez les reproductrices des deux derniers lots (T et M20) cet intervalle de temps est resté sans variation. Cette variation observée chez les femelles des lots C10, C20 et C20 ne pourrait pas être associée à un possible effet délétère de Commelina benghalensis. Chez les rongeurs, la durée de gestation est majoritairement liée aux traits génétiques de la femelle. Elle serait inversement corrélée à la taille de la portée et au gain de poids des reproductrices au cours de la gestation (Murray et al 2010). D’une façon générale chez les mammifères euthériens, la durée de la période de gestation est plus longue chez les vieilles reproductrices et chez les reproductrices ayant un poids lourd à la naissance (Roos et al 2010). Le poids à la naissance des femelles pourrait être spécifiquement corrélé à la taille du pelvis ou de la capacité utérine influençant la durée de la gestation (Lie et al 2006).

Au cours des deux cycles de reproduction, les reproductrices du lot M20 ont eu les gains de poids les plus élevés durant la gestation au cours du premier cycle (4,95g/j) et du second cycle (3,91g/j). Ces valeurs sont inférieures à celle obtenue par Mweugang et al (2016) (4,99g/j) chez les cochons d’Inde ayant reçu des compléments alimentaires à base de farine de feuilles de manioc. Le taux de mortinatalité a été également élevé au sein des cochonnets nés des femelles du lot M20. Ces morts-nés étaient complètement développés et parfois encore couverts de leur sac amniotique. Ceci indique que les mères n’ont probablement pas rompu les sacs amniotiques et les petits ont été asphyxiés au cours de la délivrance (Tejml et al 2015). L’obésité affecte négativement la reproduction chez les cochons d’Inde (Michel et Bonnet 2012). Aussi l’alimentation des femelles au cours de la gestation avec des rations contenant plus de 20% de protéines est un des facteurs causant la délivrance de fœtus morts. Cependant l’amélioration de la densité énergétique de la ration, permet entre autres, à court terme d’augmenter significativement les sécrétions hormonales (insuline, leptine, insulinlike growth factor- IGF-I-), de même que le taux d’ovulation et la viabilité embryonnaire (Bocquier et al 2002).

D’une façon générale les pertes moyennes quotidiennes de poids chez les femelles ont été plus importantes au cours du second cycle de reproduction. Ce cycle s’est déroulé au cours de la saison sèche où la qualité et la disponibilité des ressources fourragères sont limitées. Dans les tropiques en effet, la qualité des fourrages n’est bonne qu’en début de saison des pluies et se détériore au fur et à mesure que la saison avance (Babatounde et al 2010). La ressource fourragère Panicum maximum distribuée aux animaux à l’état frais n’a donc pas apporté assez d’éléments nutritifs aux reproductrices leur permettant de mieux faire face aux besoins de lactation. Les cochonnets soumis aux rations contenant Commelina benghalensis surtout ceux des lots C10 et C20 ont eu des GMQ élevés que ce soit au premier ou second cycle de reproduction aussi aucune mortalité de ces derniers n’a été enregistrée au cours de la période de lactation, ce qui serait sûrement corollaire de la bonne qualité du lait maternel qu’ils ont reçu.

Conclusion

Références bibliographiques

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Received 30 September 2019; Accepted 29 November 2019; Published 2 January 2020

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