Livestock Research for Rural Development 29 (2) 2017 Guide for preparation of papers LRRD Newsletter

Citation of this paper

Contribution des parcours à l’alimentation des petits ruminants en steppe et dans la wilaya de Djelfa, Algérie

M Yousfi, I Chachoua et N Bougouffa

Institut des Sciences Vétérinaires et des Sciences Agronomiques-Université de Batna 05000 Algérie
ilgrabsi@yahoo.fr

Résumé

L’objectif de ce travail consiste à dégager la contribution des parcours steppiques dans l’alimentation des petits ruminants dans la région steppique en Algérie à partir du bilan fourrager durant la période de 2000 à 2014, en se basant sur les données statistiques du Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural (MADR) concernant le cheptel et les disponibilités fourragères ; avec l'étude d'un cas illustré par la wilaya de Djelfa qui représente la plus grande wilaya pastorale dans la steppe algérienne.

L’analyse des données a montré que les parcours steppiques algériens participent à raison 60,4% des disponibilités fourragères procurant ainsi un apport énergétique moyen d’environ 1,73 milliard d’UF correspondant à un taux de couverture des besoins du cheptel steppique de 37,5%. Le bilan fourrager dégagé pour la wilaya de Djelfa montre que l’offre fourragère de la région est représentée essentiellement par les parcours et les pacages avec une production fourragère moyenne estimée à 73,5% offrant un apport énergétique moyen dépassant légèrement 318 millions d’UF correspondant à un taux de couverture des besoins du cheptel égal à 47,3%. Il y a un besoin urgent d'améliorer ces disponibilités.

Mots – clés: bilan fourrager, caprin, ovin



The rangelands contribution in feeding small ruminants in steppe and Djelfa wilaya, Algeria

Abstract

One of the most concerns in the Algerian Steppe is the animal feeding availability. Water scarcity, climatic irregularity and the rangeland degradation are the principal factors that affect the food supply in the region. The objective of the present study is trying to make a feed balance in the steppe rangelands over time for a period of 15 years (from 2000 to 2014) based on the Ministry of Agriculture and Rural Development statistical data. The wilaya of Djelfacase, the most important rangeland region, was individualized as an illustration. The results obtained show that the steppe rangelands area produces an energetic amount of 1.8 billion U.F corresponding to 60.4% of the fodder supplies, representing 37.5% of the flock feeding need in the region. The Djelfa wilaya rangeland energetic feeding supply reaches a quantity of 318 million UF representing a rate of 73.5% of all the feed availability and a level of 47.3% of feeding coverage.

Key words: feed balance, fodder, sheep, goat


Introduction

L’alimentation du cheptel est considérée après la génétique comme le moyen le plus efficace pour l’augmentation des rendements animaux, mais en Algérie elle constitue incontestablement, l’une des contraintes majeures à l’essor de l’élevage des ruminants. Pour Chachoua (2015), la situation fourragère en Algérie durant la compagne 2012-2013 a été marquée par un fort déficit. Pour des besoins annuels des ruminants estimés à 14,4 milliards d’UF, les disponibilités n’étaient en moyenne que de 6 milliards d'UF, soit un taux de couverture globale de 41,6 %. Cette situation est imputable en grande partie au caractère aléatoire et saisonnier de la production fourragère, en raison d'une faible pluviométrie et de fréquentes sécheresses. Ce sont surtout les zones arides et semi-arides qui représentent l’offre fourragère la plus insuffisante puisque la nature des ressources fourragères est dominée par les pacages et les parcours, qui se dégradent sous l’effet de plusieurs facteurs anthropiques et naturels (Nedjraoui 2002). Environ 17,8 millions de têtes de petits ruminants vivent sur les 20 millions d’hectares qu’occupe la steppe algérienne (MADR 2014). Avec plus de 3,2 millions d’ovins (14 % du cheptel national), la wilaya de Djelfa est la région d’élevage la plus importante en Algérie, et par conséquent la plus importante en matière de production de viandes rouges ovines. Cette activité connait aujourd’hui de sérieux problèmes en raison notamment de la dégradation des parcours steppiques (DSA 2008). Afin de ressortir la part et l’importance de l'apport fourrager des parcours et pacages dans l’alimentation des ruminants dans cette région, notre étude s’est axée sur l’examen détaillé de la structure du bilan fourrager par l’estimation des besoins du cheptel en unités zootechniques ovines (UZO) et les apports énergétiques des fourrages en unités fourragères (UF) sur une période de quinze ans.


Matériel et méthodes

Situation générale de la wilaya de Djelfa

La wilaya de Djelfa est située dans la partie centrale de l’Algérie du Nord au delà des piémonts Sud de l’Atlas Tellien. Le chef lieu de la wilaya est à 300 km au sud d’Alger. Sa superficie totale est de 32 362 km2 représentant 1,36% de la superficie totale du pays et se compose de 36 communes regroupées en 12 dairate. Sa situation géographique lui confère une place privilégiée dans les relations Nord-Sud (DSPB, 2012). Elle se distingue par un hiver froid rigoureux et un été chaud lui conférant un climat semi-aride à aride avec une nuance continentale (Djaballah, 2008). L’agriculture dans la wilaya se caractérise par la prédominance du pastoralisme constituant la principale base économique de la région occupant une population représentant 37,7% de la population totale (DSA, 2008).

Calcul des besoins alimentaires du cheptel

Le calcul des besoins alimentaires du cheptel nécessite l’utilisation d’une unité technique à caractère synthétique, à cause de la diversité de la composition du cheptel. Notre choix s'est porté sur l'utilisation de l'Unité Zootechnique Ovine (UZO) représentant un cortège de brebis, béliers, antenais, antenaises, agneaux et agnelles de renouvellement ou destinés à la vente. Elle est aussi égale au rapport entre les effectifs de chaque catégorie d’animaux et le nombre de brebis. Elle s'exprime par la formule suivante :

1 UZO = 1 brebis + 0,05 bélier + 0,02 antenais + 0,02 antenaise + 0,7 agneau + 0,2 agnelle.

L'Unité Zootechnique Caprine (UZC) est exprimée par la formule suivante :

1 UZC = 1 chèvre + 0,05 bouc + 0,7 chevreau + 0,2 chevrette.

Pour un souci d'harmonie entre unités (UZO et UZC), on a opté et en conformité avec l'INRA (1978) à considérer que l'UZC est égal à l'UZO pondérée d'un coefficient de 0,8.

A cet effet l’effectif ovin et caprin en nombre de têtes a été transformé en UZO par les coefficients de conversion correspondant à chaque catégorie d’animaux. Les besoins alimentaires ont été calculés sur la base d'une UZO correspondant à 400 UF/ année en concordance avec les méthodes préconisées par l’INRA (1978).

Estimation de l’offre fourragère

Pour cette étape de travail, nous avons dans un premier temps dressé un tableau englobant les principaux fourrages produits en ha au cours de la période 2000 - 2014. Puis, dans un deuxième temps, nous avons affecté à chaque fourrage un coefficient exprimant sa valeur nutritive en UF selon les normes établies par l’ITELV (1997). Les apports en UF des différentes sources fourragères ont été déterminés comme suit :

· Les fourrages cultivés 1 500 UF/ha.

· Les jachères :

- Nues fauchées 300 UF/ha.

- Nues pâturées 350 UF/ha.

· Les prairies naturelles 1 200 UF/ha.

· Les pacages et les parcours :

- En zone montagneuse 300 UF/ha.

- En zone littorale 500 UF/ha.

- En zone steppique 150 UF/ha.

- En zone désertique 50 UF/ha.


Résultats et discussion

Estimation des besoins des ovins et caprins en steppe

Les données du tableau n°1 montrent la distribution des effectifs moyens en têtes et en UZO des cheptels ovin et caprin à travers les différentes wilayate du territoire steppique en Algérie.

Tableau 1. Effectif moyen en têtes et en UZO du cheptel ovin et caprin steppique en Algérie de 2000 à 2014

Wilaya

Effectif ovin

Effectif caprin

Total

Têtes

UZO

Têtes

UZO

UZO

Tebessa

876 545

555 171

170 140

94 514

649 685

Khenchla

315 083

226 059

61 058

38 274

264 333

Oum El Bouaghi

507 475

318 619

69 359

38 394

357 016

Batna

556 494

357 201

205 753

117 380

474 581

Souk Ahras

331 970

206 179

94 475

52 598

258 777

Biskra

780 709

522 309

204 583

126 522

648 831

Bouira

209 431

125 506

27 463

15 342

140 848

Bordj Bou Arreridj

289.211

183.782

45.549

25.676

209.458

Medea

652 793

364 977

77 312

43 190

408 167

Setif

474 235

281 062

67 323

38 273

319 335

Djelfa

2 521 454

1 716 213

316 857

201 483

1 917 696

Laghouat

1 488 368

1 234 078

178 144

121 746

1 412 222

M’sila

1 470 100

1 024 850

125 439

77 278

1 102 228

Tiaret

1 255 962

832 562

135 717

77 577

910 139

El Bayadh

1 548 075

1 047 781

130 139

81 599

1 129 380

Saida

572 086

412 338

36 202

20 921

433 259

Sidi Bel Abbes

534 540

361 007

22 295

12 646

373 653

Tlemcen

442 527

306 760

33 545

19 306

326 066

Nȃama

946 460

682 158

54 350

32 680

714 838

Total

15 773 518

10 758 612

2 055 703

1 235 399

11 994 011

(MADR 2014)

La lecture du tableau fait ressortir une concentration du cheptel dans les cinq wilayate de Djelfa, Laghouat, Tiaret, El Bayadh et Nâama totalisant un effectif de 7 186 503 d'UZO, soit 59,9% du cheptel total de la steppe algérienne. La wilaya de Djelfa reste de loin la plus importante région de l'activité pastorale avec 16,0% du cheptel que compte la steppe.

Comparativement à la période objet de notre étude totalisant un effectif de plus de 17,8 millions de têtes, la période des années 70 comptait près de 7 millions de têtes ce qui représente un accroissement numérique de plus de 10,8 millions de têtes sur une période de 30 années, soit une croissance de 154,3%. Cette augmentation implique certainement des répercussions sur la disponibilité fourragère et interpelle sur la capacité de la région steppique à maintenir un équilibre entre l'offre fourragère et les besoins du cheptel en nette croissance. Durant cette période la population steppique est passée de 7 650 000 d'habitants à un peu plus de 13 000 000, soit un accroissement de 70,0%.

Estimation de l’offre fourragère en steppe

Le tableau 2 résume l’estimation des disponibilités fourragères moyennes de 2000 à 2014 destinées à l’alimentation du cheptel en régions steppiques.

Tableau 2. Production fourragère moyenne en (UF) destinées à l’alimentation du cheptel en zones steppiques de 2000 à 2014

Wilaya

Fourrages
cultivés

(%)

Jachères
pâturées

(%)

Jachères
fauchées

(%)

Pacages et
parcours

(%)

Prairies
naturelles

(%)

Total
(UF)

Tebessa

87 025800

47

33 980 753

18

528 000

0

65 253 550

35

144 000

0

186 932 103

Khenchla

20 776 200

20

20 435 170

20

1 474 940

1

60 878 180

59

59 200

0

103 623 690

O. E. Bouaghi

30 540 800

32

44 265 993

46

1 410 940

1

18 384 940

19

804 000

1

95 406 673

Batna

40 384 400

27

68 743 990

46

1 927 940

1

38 820 460

26

769 280

1

150 646 070

Souk Ahras

7 457 300

20

13 908 720

37

6 729 320

18

7 401 000

20

1 817 600

5

37 313 940

Biskra

11 160 700

5

21 637 700

9

0

0

211 212 390

87

0

0

244 010 790

Bouira

15 846 200

34

18 164 976

39

332 360

1

11 923 930

26

0

0

46 267 467

B. B. Arreridj

9 785 900

35

8 256 593

30

2 096 580

8

7 556 860

27

179 840

1

27 875 773

Medea

38 165 900

30

43 758 143

34

1 140 160

1

43 984 520

35

73 120

0

127 121 843

Setif

28 484 200

41

27 755 303

40

2 953 220

4

8 613 510

12

2 319 440

3

70 125 673

Djelfa

14 471 800

3

100 304 283

23

0

0

318 319 820

73

0

0

433 095 903

Laghouat

15 332 200

6

11 875 196

5

0

0

229 240 410

89

0

0

256 447 807

M’sila

35 029 000

15

49 610 400

21

0

0

149 511 450

64

0

0

234 150 850

Tiaret

67 409 300

38

54 712 443

31

7 400

0

57 025 020

32

60 000

0

179 214 163

El Bayadh

1 587 800

0

11 760 560

3

300

0

433 440 000

97

0

0

446 788 660

Saida

2 460 200

3

57 310 843

77

0

0

15 096 950

20

0

0

74 867 993

Sidi B. Abbes

17 318 800

30

39 944 776

69

0

0

656 500

1

0

0

57 920 077

Tlemcen

22 995 100

44

5 786 060

11

40 000

0

23 988 180

45

0

0

52 809 340

Nȃama

3 065 500

10

3 656 613

12

0

0

24 304 380

78

0

0

31 026 493

Total

469 297 100

16,4

635 868 520

22,3

18 641 160

0,65

1 725 612 050

60,4

6 226 480

0,22

2 855 645 310

(MADR 2014)

Le total des superficies destinées à l’affouragement du cheptel des 19 wilayas steppiques s’élève à 14 millions d’ha contre 12 millions cité par Chellig (1974) dont 66 % sont représentés par les pacages et parcours suivi des jachères pâturées avec un taux de 27 % .

La lecture du tableau n°2 ci-dessus montre que globalement l'essentiel de la production fourragère énergétique (environ 1,8 milliard UF) utilisée dans l'alimentation du cheptel de l'espace steppique provient des pacages et parcours (60,4%), suivi des jachères pâturées (22,3% avec une production d'environ 0,64 milliards d'UF) et des fourrages cultivés (16,4% avec une production d'environ 0,47 milliards d'UF). La production fourragère des jachères fauchées et des prairies naturelles reste marginale et leur contribution dans l'alimentation animale en steppe représente moins de 1%.

Toutefois une lecture détaillée du tableau fait ressortir que la production des fourrages énergétiques au niveau de chaque wilaya ne suit pas obligatoirement la tendance globale de l'ensemble de l'espace steppique. Elle dépend, plutôt, de la vocation pastorale ou agro-pastorale de chaque région.

Les wilayate à vocation purement pastorale (Djelfa, Laghouat, M'sila, El Bayadh, Nâama) tirent la majeure partie de leur production fourragère énergétique des pacages et parcours ; on peut même remarquer que pour la wilaya d'El Bayadh, la quasi-totalité de sa production (97 %) provient des pacages et parcours.

Pour les wilayate ayant une vocation agro-pastorale (le cas de Tébessa, Oum El Bouaghi, Souk Ahras, Batna, Bouira, Bordj Bouareridj, Sétif, Tiaret, Saida, Sidi Bel Abbes et Tlemcen), la contribution des parcours et pacages représente moins de 50% des ressources fourragères énergétiques et la plus grande partie de la disponibilité fourragère provient des cultures fourragères et des jachères pâturées. On peut même remarquer que dans les wilayate de Tébessa, Bordj Bouareridj, Sétif, Tiaret et Tlemcen, il y a une prédominance des cultures fourragères par rapport aux autres ressources.

Le cas de la wilaya de Khenchela, également à vocation agro-pastorale, forme l'exception pour des raisons d'une offre fourragères très importante dans les pacages et parcours de la zone pré-saharienne.

Bilan fourrager steppique

La comparaison entre l’offre fourragère et les besoins alimentaires du cheptel ovin et caprin est représentée sur le tableau n°3.

On remarque qu’il y a une adéquation entre l’offre fourragère et les besoins alimentaires du cheptel pour les Wilaya de Biskra, Bouira, El Bayadh et Khenchla puisque l’offre fourragère de ces dernières couvre presque totalement les besoins alimentaires du cheptel durant toute la période d’étude.

Tableau 3. Bilan fourrager en zones steppiques durant la période allant de 2000 à 2014

Wilaya

Effectifs
(UZO)

Besoins du cheptel
(UF)

Offres fourragères
(UF)

Déficit
(UF)

Taux de
couverture (%)

Déficit
(%)

Tébessa

649 685

259 874 081

186 932 103

-72 941 977

71,9

28,1

Khenchela

264 333

105 733 058

103 623 690

-2 109 368

98,0

2,0

O E Bouaghi

357 013

142 805 001

95 406 673

-47 398 327

66,8

33,2

Batna

474 581

189 832 269

150 646 070

-39 186 199

79,4

20,6

Souk Ahras

258 778

103 511 055

37 313 940

-66 197 115

36,0

64,0

Biskra

648 831

259 532 513

244 010 790

-15 521 723

94,0

6,0

Bouira

140 848

56 339 067

46 267 467

-10 071 601

82,1

17,9

B B Arreridj

209 458

83 783 213

27 875 773

-55 907 439

33,5

66,7

Médéa

408 167

163 266 791

127 121 843

-36 144 948

77,9

22,1

Sétif

319 335

127 734 172

70 125 673

-57 608 499

54,9

45,1

Djelfa

1 917 696

767 078 376

433 095 903

-333 982 473

56,5

43,5

Laghouat

1 355 824

542 329 599

256 447 807

-285 881 792

47,3

52,7

M’sila

1 102 129

440 851 436

234 150 850

-206 700 586

53,1

46,9

Tiaret

910 140

364 055 803

179 214 163

-184 841 639

49,2

50,8

Saida

433 260

173 303 911

74 867 993

-98 435 917

43,2

56,8

El Bayadh

1 129 380

451 751 907

446 788 660

-4 963 247

98,9

1,1

Sidi B Abbes

373 653

149 461 023

57 920 077

-91 540 947

38,8

61,2

Tlemcen

326 066

130 426 352

52 809 340

-77 617 012

40,5

59,5

Nâama

714 838

285 935 331

31 026 493

-254 908 838

10,9

89,1

Total

11 994 012

4 797 604 958

2 855 645 310

-1 941 959 648

59,5

40,5

(MADR 2014)

Globalement, le déficit fourrager dans l'espace steppique se situe autour de 40% en moyenne sur la période 2000 – 2014. Ceci paraît normal dans la mesure où cet espace est soumis à des fluctuations interannuelles et inter saisonnières très importante en matière de pluviométrie engendrant des déficits appréciables en production fourragère des pacages et parcours.

Toutefois, le tableau n°3 montre que la distribution spatiale des déficits n'est pas forcément liée à la vocation de chaque wilaya (pastorale ou agropastorale) ou à l'importance de son cheptel (degré de pression sur la disponibilité des ressources pastorales). On peut, ainsi, constater que mise à part la wilaya de Nâama qui enregistre le déficit le plus élevé qui pourrait être imputable au degré de dégradation de ses parcours et l'accroissement de l'effet de la désertification sur son espace fourrager naturel ; ce sont les wilayate à vocation agro-pastorale bénéficiant de plus de ressources hydriques qui accusent des déficits fourragers très importants à l'instar des wilayate de Bordj Bou Arreridj, Souk Ahras, Sid Belabbes, Tlemcen, Saida et Tiaret qui sont à vocation agro-pastorale et qui enregistrent toutes des déficits fourragers supérieurs à 50%. A l'inverse la wilaya d'El Bayadh à vocation purement pastorale enregistre le déficit le moins faible de toute la steppe (1,1%).

Ce fait interpelle d'autres facteurs qui doivent focaliser l'attention de la recherche à l'instar des défrichements opérés dans les wilayate à vocation agro-pastorale sur les terrains de parcours au profit de l'extension des cultures céréalières à rendement aléatoire. En effet, l'application de la politique agricole de la mise en valeur dans les régions steppiques a engendré des pertes très appréciables en matière d'espace et de production pastorale dans les régions ayant subi cette politique (Nedjraoui 2004).

Le déficit qui touche quasiment tout l'espace steppique implique la mobilisation d'autres ressources fourragères, les concentrés importés de l'étranger en premier lieu représentant une quantité très importante. Les chiffres du MADR (2014) parlent de plus de 770 000 tonnes d'orge et 13 000 tonnes d'avoine pour une somme de plus de plus de 2 millions de dollars américains. Cette tendance, si elle se maintient durant les années prochaines peut avoir des répercussions graves sur la durabilité des ressources fourragères naturelles en steppe et partant met en cause le système d'élevage extensif dans cet espace.

Un cas d'illustration : la wilaya de Djelfa

Effectif en têtes du cheptel ovin et caprin de la wilaya de Djelfa

A partir des données statistiques du ministère de l’agriculture, nous avons établi la composition du cheptel Ovin et Caprin par âge et par sexe dans la wilaya de Djelfa sur une période d’une quinzaine d’année allant de 2000 à 2014.

Tableau 4. Effectif en têtes et en UZO du cheptel ovin et caprin de la wilaya de Djelfa durant la période allant de 2000 à 2014

Année

Effectif ovin

Effectif caprin

Total UZO

Têtes

UZO

Têtes

UZO

2000

2 248 500

1 483 093

244 600

150 876

1 633 969

2001

2 002 180

1 329 781

248 870

152 702

1 482 483

2002

1 994 950

1 320 563

252 800

158 794

1 479 357

2003

2 071 000

1 362 345

259 800

163 440

1 525 785

2004

2 288 800

1 482 965

265 700

160 384

1 643 349

2005

2 382 000

1 528 013

319 500

201 564

1 729 577

2006

2 399 700

1 541 365

326 000

204 760

1 746 125

2007

2 450 000

1 567 570

335 000

210 520

1 778 090

2008

2 500 000

1 582 724

335 000

210 832

1 793 556

2009

2 517 300

1 591 725

340 150

217 469

1 809 194

2010

2 752 000

1 952 190

337 000

220 232

2 172 422

2011

2 891 800

2 068 912

348 370

224 783

2 293 695

2012

2 967 300

2 188 548

361 800

234 264

2 422 812

2013

3 113 500

2 312 203

382 960

250 358

2 562 561

2014

3 242 760

2 431 201

395 300

261 263

2 692 464

Moyenne

2 521 453

1 716 213

316 034

201 483

1 917 696

(MADR 2014)

La moyenne de l'effectif du cheptel exprimée en UZO sur la période des 15 années se situe aux environs de 1,92 million d'unités avec une progression annuelle moyenne de 73,0 %.

La période entre 2000 et 2002, enregistre une baisse d'un taux moyen de 11,3 % de têtes d'ovins (équivalent de 11,0 % UZO) et simultanément une augmentation de 3,4 % de têtes de caprins, ont induit une diminution 5,2 % d'UZO.

A partir de l'année 2003 jusqu'à l'année 2014, une croissance numérique positive a été observée dans les effectifs ovins et caprins impliquant une augmentation des besoins du cheptel vivant dans l'espace steppique.

L&L’offre fourragère

Le total des superficies destinées à l’affouragement du cheptel de la Wilaya étudié s’est élevé à 2 418 364 ha ; l’essentiel de ces superficies est représenté par les pacages et parcours avec un taux de 87,8 % en moyenne, jachères pâturées d’un taux de 11,8 % et enfin 0,4 % pour les fourrages cultivés.

Tableau 5. Estimation de la production fourragère en (UF) pour la wilaya de Djelfa durant la période allant de 2000 à 2014.

Année

Fourrages
cultivés

(%)

Jachères
pâturées

(%)

Jachères
fauchées

(%)

Pacages et
parcours

(%)

Prairies
naturelles

(%)

Total

2000

6 004 500

1,4

105 767 200

24,6

0

0,0

317 697 000

74,0

0

0,0

429 468 700

2001

1 410 000

0,3

110 625 550

25,7

0

0,0

318.364.500

74,0

0

0,0

430 400 050

2002

2 785 500

0,7

99 583 400

23,7

0

0,0

318 364 500

75,7

0

0,0

420 733 400

2003

4 327 500

1,00

113 543 150

26,0

0

0,0

318 364 500

73,0

0

0,0

436 235 150

2004

5 119 500

1,21

100 109 100

23,6

0

0,0

318 364 200

75,2

0

0,0

423 592 800

2005

7 500 000

1,77

98 607 250

23,2

0

0,0

318 364 200

75,0

0

0,0

424 471 450

2006

7 650 000

1,79

102 235 700

23,9

0

0,0

318 364 500

74,3

0

0,0

428 250 200

2007

4 800 000

1,10

114 827 300

26,2

0

0,0

318 364 500

72,7

0

0,0

437 991 800

2008

4 950 000

1,16

104 268 150

24,4

0

0,0

318 364 200

74,5

0

0,0

427 582 350

2009

8 443 500

1,99

96 641 650

22,8

0

0,0

318 364 200

75,2

0

0,0

423 449 350

2010

19 783 500

4,54

97 441 400

22,4

0

0,0

318 364 200

73,1

0

0,0

435 589 100

2011

29 925 000

6,69

98 965 650

22,1

0

0,0

318 364 200

71,2

0

0,0

447 254 850

2012

35 754 000

8,11

86 719 500

19,7

0

0,0

318 364 200

72,2

0

0,0

440 837 700

2013

27 081 000

6,29

85 037 750

19,8

0

0,0

318 364 200

74,0

0

0,0

430 482 950

2014

51 543 000

11,2

90 191 500

19,6

0

0,0

318 364 200

69,2

0

0,0

460 098 700

Moyenne

17 908 000

4,13

100 304 283

23,2

0

0,0

318 319 820

73,5

0

0,0

433 092 303

(MADR 2014)

La production fourragère totale de la Wilaya durant la période de 2000 à 2014 est évaluée à plus de 433 millions d’UF en moyenne, cette production provenant essentiellement des pacages et parcours avec un taux de 73,5 % en moyenne ; les autres ressources fourragères ont une faible participation où les jachères pâturées représentent un taux de 23,2 % et 3,3 % pour les fourrages cultivés.

Les productions fourragères de la région de Djelfa proviennent principalement des pacages et parcours (plus de 70 %) ; cette situation a été également rencontrée pour les productions fourragères de toute la région steppique et ceci s’explique par l’aridité du climat.

Bilan fourrager de Djelfa

Tableau 6. Bilan fourrager de la wilaya de Djelfa durant la période allant de 2000 à 2014

Année

Effectifs
(UZO)

Besoin du cheptel
(UF)

Offre fourragère
(UF)

Déficit
(UF)

Taux de
couverture (%)

Déficit
(%)

2000

1 633 969

653 587 600

429 468 700

-224 118 900

65,7

34,3

2001

1 482 483

592 993 160

430 400 050

-162 593 110

72,6

27,4

2002

1 479 357

591 742 800

420 733 400

-171 009 400

71,1

28,9

2003

1 525 785

610 314 000

436 235 150

-174 078 850

71,5

28,5

2004

1 643 349

657 339 600

423 592 800

-233 746 800

64,4

35,6

2005

1 729 577

691 830 800

424 471 450

-267 359 350

61,4

38,7

2006

1 746 125

698 450 000

428 250 200

-270 199 800

61,3

38,7

2007

1 778 090

711 236 000

437 991 800

-273 244 200

61,6

38,4

2008

1 793 556

717 422 400

427 582 350

-289 840 050

59,6

40,4

2009

1 809 194

723 677 520

423 449 350

-300 228 170

58,5

41,5

2010

2 172 422

868 968 800

435 589 100

-433 379 700

50,1

49,9

2011

2 293 696

917 478 240

447 254 850

-470 223 390

48,8

51,3

2012

2 422 812

969 124 800

440 837 700

-528 287 100

45,5

54,5

2013

2 562 561

1 025 024 240

430 482 950

-594 541 290

42,0

58,0

2014

2 692 464

1 076 985 680

460 098 700

-616 886 980

42,7

57,3

Moyenne

1 917 696

767 078 376

433 092 303

-333 982 472

56,5

43,5

(MADR 2014)

Le tableau ci-dessus fait ressortir que pour la période d’étude, les besoins moyens du cheptel ovin et caprin en UF sont de l’ordre de 767 millions d’UF en comparaison avec l’offre (433 millions d’UF). Cela représente un taux de couverture de 56,5 % donc les disponibilités fourragères n’arrivent pas à satisfaire les besoins alimentaires des animaux en engendrant un déficit égal à 43,5 % lié au manque et à la dégradation des parcours.


Conclusion


Références bibliographiques

Bencherif S 2011 L’élevage pastoral et la céréaliculture dans la steppe algérienne. Évolution et possibilités de développement. Thèse de doctorat. Institut des Sciences et Industries du Vivant et de l’Environnement (Agro Paris Tech), Paris 269p

Chachoua I 2015 L’urée dans l’alimentation des ovins : conséquences sur la gestation, la parturition et le croît. Thèse de doctorat. Institut des Sciences Vétérinaires et des Sciences Agronomiques, Université de Batna 98p

Chellig R 1974 Les pâturages steppiques, 1er Séminaire International sur le pastoralisme, Alger , 22-23 Avril 10p

INRA 1978 Alimentation des ruminants INRA publications Versailles, 597p

ITELV 1997 Problématique de l’alimentation du cheptel à travers le bilan fourrager. Département ruminants ITELV de Baba Ali Alger ,17p

Le Houerou H N 1995 Bioclimatologie et biogéographie des steppes arides du Nord de l'Afrique. Diversité biologique, développement durable et désertification. Option méditerranéennes, CIHEAM, Montpellier série B études et recherches n° 10, 397p

MADR 2014 Statistique agricole, superficies et productions. Ministère de l’agriculture et du développement rural Série B

Nedjraoui D 2001 Profil fourrager. Algérie. FAO, 36p www.fao.org/ag/agp/agpc/doc/ counprof/Algeria/Algerie.htm

Nedjraoui D 2002 Les ressources pastorales en Algérie. FAO, Rome.15p

Nedjraoui D 2004 Evaluation des ressources pastorales des régions steppiques algériennes et définitions des indicateurs de dégradation. IAMZ-CIHEAM Cahiers Options Méditerranéennes Vol. 62, PP : 239-243.


Received 11 September 2016; Accepted 17 November 2016; Published 1 February 2017

Go to top